« Je suis pedrosexuel·le »

Le sigle LGBTQ+ ne s’est pas doté d’un autre P, mais l’engouement pour la pedrosexualité est bien réel. 

« Regardez-vous parfois des comptes Instagram où vous êtes un tombeur, lorsque vous vous sentez déprimé ? »

« … Oui, je le fais !! » 😂

Le rire sincère et contagieux de l’acteur, alors qu’il répond aux questions du détecteur de mensonges du magazine Vanity Fair en 2023 (j’ai dû l’écouter 20 fois), encapsule parfaitement le charme et le charisme qui ont contribué à créer cette nouvelle orientation sexuelle : la pedrosexualité. On s’y est fait prendre et pas qu’un peu ; à fond les ballons. (🙋‍♀️) 

Bon, soyons clair·e·s : c’est plutôt une attirance culturelle et émotionnelle (merci ChatGPT !) envers Pedro Pascal qui s’opère ici. Mais reste que c’est vrai ; il est devenu l’homme de la situation. Pourquoi ? 

Masculinité toxique ? Ciao bye !  

Alors qu’on assiste à une importante montée masculiniste, particulièrement chez les jeunes, avec des figures de proue comme Andrew Tate, Pedro Pascal, eh bien, c’est l’inverse de tout cela. Il démontre sensibilité, gentillesse, écoute, humour, alliance, empathie et, surtout, vulnérabilité. C’est le gars qui fait fondre le cœur des fans, alors qu’au Comicon 2024 de San Diego, il signale à l’actrice Vanessa Kirby de lui tenir la main pour calmer son anxiété. Un homme qui, devant public, accepte de montrer ses failles, sans que cela lui enlève une once de virilité ou de masculinité. Ce même homme, fan #1 de sa sœur Lux Pascal, une actrice transféminine, qui s’affiche fièrement avec un t-shirt Protect the dolls, slogan issu de la culture ballroom des années 80 qui souligne l’importance de soutenir les femmes trans, particulièrement celles des communautés noires et latinas. Allié LGBTQ+ de surcroît ? Solidaire des migrants (fils de migrants lui-même) ? Que demander de plus ! 

Dans un monde où l’on élit des présidents ouvertement misogynes, sexistes, racistes et transphobes (la liste aurait pu continuer longtemps), Pedro Pascal est un vent de fraîcheur. L’espoir qu’il reste encore, en ce bas monde, des hommes fondamentalement bons. Entendons-nous ; c’est l’image qu’il projette. On ne le connaît pas dans la vie de tous les jours, mais le personnage public qu’il endosse a de quoi encourager. Et quand, en plus, cela prend forme dans un visage à la fois beau et sympathique, quoiqu’imparfait ; un corps athlétique sans excès ; et des tenues griffées portées à la perfection, c’est encore mieux ! 

Pas surprenant, alors, qu’on s’éprenne (je m’étonne qu’on ne parle pas plus de pedroromantisme) de cette figure à la fois sexy, humaine, imparfaite et… paternelle. 

Daddy (ou zaddy) AF*

Un état d’esprit. C’est ainsi que Pedro Pascal décrit le fait d’être un daddy. Il s’est aussi vu monter en grade vers le zaddy. Un daddy avec du swag. OK, mais être daddy, c’est quoi exactement ? Pourquoi est-ce qu’on se passionne pour cet archétype alors que les « tech bros » dirigent déjà un monde assez patriarcal merci ? 

Selon Mark Harris, journaliste au New York Times, le daddy est « un dur à cuire d’âge moyen, avec un sens de l’ironie et […] une hétéroflexibilité implicite hors caméra ». Il représente aussi « une invitation amusante, espiègle, provocatrice et transgressive au jeu de rôle — [on] fait de l’attirance sexuelle un jeu et élargit la gamme, jusqu’ici étroite et âgiste de ceux qui sont autorisés à la table ». Bref, on joue avec les codes à la fois issus des mondes hétéro et queer, pour en faire un amalgame plus fluide. C’est une contre-proposition à la masculinité traditionnelle, enfermée dans des carcans peu flexibles.

Celle-ci est non menaçante, douce, mais tout de même virile et protectrice. Avec ses looks distinctifs, Pedro incarne autant la vague des babygirl men ; des hommes stylés, sexy, mais avec un côté complètement adorable. (L’acteur et ami de Pascal, Oscar Isaac, le surnomme d’ailleurs sa « Sweet Little Girlfriend ».) Mais c’est aussi Joel dans The Last of Us (HBO), séduisant avec sa figure paternelle pleine de failles, mais ô combien belle et réconfortante. Le leader qui mène avec force, courage, mais aussi tout l’amour du monde. Bref, ce dude n’est pas juste cool ; il incarne une humanité que l’on voit actuellement trop rarement chez nombre d’hommes. Et ça, pour beaucoup de gens, c’est érotique AF.

Un besoin de fluidité… et d’humanité  

Dans cette ère aux idéaux rigides, on a besoin de lousse ; dans nos horaires, nos idées, mais aussi dans nos relations, nos amours, nos sexualités. Et, particulièrement, dans nos façons d’être. Ainsi, Pedro Pascal est probablement l’incarnation de nos contradictions humaines. Avec son succès tardif inespéré, le gars atteint à la fois un statut extrêmement enviable et puissant, mais semble le prendre comme ça vient, avec humilité. 

Il est peut-être hétéro, gai ou bi. Ou rien de tout ça. On n’en sait rien. Et on s’en fout. Il est à la fois tendre et tough, sérieux et drôle, engagé et relaxe, beau et ordinaire. Il se permet d’être tout ça simultanément. Pour nous, qui regardons aller ce monde de vedettes et de glam, qui renforce toujours énormément les stéréotypes de genre et les modèles hollywoodiens créés sur un même moule, il détonne. Et nous soulage en nous montrant, ah tiens, un peu de sincérité. D’humanité. 

Et ça, en nos temps troublés et incertains, non seulement ça fait un bien fou, mais ça nous donne peut-être envie d’embrasser un peu (beaucoup) de pedrosexualité. 

‍*Référence à la chanson Daddy AF de Slayyyter