Le rôle des conflits dans l’harmonie des relations intimes

Les conflits sont inévitables dans les relations intimes, mais leurs conséquences dépendent de la façon dont ils sont vécus et gérés. Loin d’être uniquement destructeurs, ils peuvent renforcer la communication, la compréhension mutuelle et la croissance personnelle. Comment transformer ces tensions en opportunités pour créer des relations plus harmonieuses et épanouissantes ?

Qu’est-ce qu’un conflit ?

Selon Le Robert, dico en ligne, un conflit se définit par la « rencontre d’éléments, de sentiments contraires, qui s’opposent ». Qu’ils soient interpersonnels, organisationnels, sociétaux, entre États, ou même intrapersonnels ; les conflits sont partout et personne n’en est à l’abri ! Ici, on va se pencher sur les conflits qui surviennent au sein des relations intimes et sur comment les apprivoiser.

Attention ! Conflit dans les relations intimes n’égale pas dynamique de pouvoir inégal.

Lors d’un conflit sain, des émotions désagréables peuvent faire surface, certes, mais il est important que les personnes qui y prennent part le fassent dans le respect de l’autre. Quand une dynamique de pouvoir se forme et qu’un parti cherche à anéantir l’autre, on se trouve dans un conflit à tendance malsaine.

Pas de panique ! Aucun conflit n’est parfait. Ça arrive à tout le monde de lancer de petites piques ou de s’échapper en parlant au « tu » une fois de temps en temps. Cependant, on gagne à faire une introspection sur nos mécanismes qui s’activent quand on vit un conflit, permettant ainsi de prendre soin de nos relations intimes (et de nous-mêmes !).

Avant un conflit

Avant de se tourner vers ce qui se passe pendant un conflit, explorons ce qui peut les déclencher dans les relations intimes.

L’étude de Lamarre et Lussier (2007) rapporte les sujets les plus propices au déclenchement de conflits chez des couples canadiens en se basant sur des écrits scientifiques. Ces sujets seraient les suivants :

1. L’affection ;
2. La communication ;
3. Les doutes par rapport au futur de la relation ;
4. Les comportements irrespectueux ;
5. La notion d’exclusivité.

Les mêmes auteur·e·s ont également questionné des psychologues sur ce qui, selon ces professionnel·le·s, suscite plus fréquemment les conflits chez les couples vus dans le cadre de leurs fonctions. Voici ce qui est ressorti :

1. Les comportements du·de la conjoint·e (une personne a des comportements négatifs, comme la critique, l’impulsivité, l’égoïsme, l’irresponsabilité ou l’immaturité) ;
2. Les conflits liés au quotidien, comme les tâches ménagères, le stress et le travail ;
3. Un·e partenaire est trop distant·e ;
4. Un manque d’engagement de l’une des parties de la relation ;
5. La sexualité.

*Petite précision ici : par relation intime, on fait référence aux relations qui témoignent d’une intimité émotionnelle, physique, intellectuelle et/ou spirituelle. Cela dit, toute relation intime n’est pas automatiquement une relation amoureuse ou de couple. Les résultats de l’étude ne sont pas 100% généralisables à toutes les relations intimes, mais ils agissent à titre d’indicateurs des tendances que peuvent prendre les dynamiques relationnelles.

En ce sens, l’étude d’Overall et McNulty (2017) s’est penchée sur les causes fréquentes des conflits au sein des relations intimes en général. Les voici : les attentes non satisfaites, l’intimité, le temps passé ensemble, les difficultés financières, les déséquilibres en matière d’équité et de pouvoir, les responsabilités domestiques et familiales, l’éducation des enfants, la jalousie, les mauvaises habitudes… la liste est longue !

Bien sûr, plusieurs autres éléments peuvent déclencher un conflit ! Un couteau sale qui traîne sur le comptoir depuis 2 jours, tan partenaire a oublié la fête de ton chat, ou bien vous ne vous entendez pas pour le choix du souper entre du Poulet Rouge ou du Thaï Express ? Tout événement peut générer des flammèches spontanées.

Pendant un conflit

Les réactions possibles

Les chercheuses Caryl E. Rusbult, Isabelle M. Zembrodt et Lawanna K. Gunn ont développé, en 1982, un modèle abordant les différentes réponses aux insatisfactions dans les liaisons amoureuses. 

Selon elles, il existe quatre réactions principales aux conflits en contexte intime. Chaque réaction a son propre nom. Eh non, on n’est pas dans les maisons d’Harry Potter, mais bien dans les types de réactions aux conflits. On les appellera ici les « langages du conflit ». 

1. La sortie (Exit)

Réaction DESTRUCTIVE et ACTIVE face au conflit.

Qu’est-ce que la sortie ? La réponse est dans la question : sortie = I’M OUT. Une personne dont le langage du conflit est la sortie prendra des mesures assez drastiques pour se distancer de la situation. La sortie peut aussi consister en des comportements destructeurs, comme le fait de « chercher la chicane » constamment pour camoufler un plus grand problème sous-jacent. Des exemples :

• Quitter la pièce dès qu’un·e partenaire manifeste un mécontentement ;
• Mettre fin à la relation sans explication (bonus : au moment où un problème fait surface, mais toujours sans explication) ;
• Aller chercher du réconfort ailleurs pour éviter la discussion avec san partenaire (on me dit à l’oreille que l’infidélité pourrait faire partie des comportements d’évitement).

Don’t get me wrong! Parfois, abandonner une relation peut être nécessaire lorsqu’on ne s’y sent plus confortable. Cependant, si quitter est ton premier réflexe avant toute tentative de compromis ou de réconciliation, ce n’est peut-être pas la tendance que je recommanderais ! 

2. La négligence (Neglect)

Réaction DESTRUCTIVE et PASSIVE face au conflit.

Comme le nom l’indique, la négligence survient quand une personne ignore volontairement un problème, essaie de l’éviter, ou encore, se désinvestit émotionnellement de la relation. Dans les relations intimes, cela pourrait se traduire par…

• Ignorer les messages, les appels ou les discussions portant sur des sujets importants ou sensibles ;
• « Ghoster » une personne avec qui on a eu quelques dates ;
• Faire très peu d’efforts pour montrer de l’affection à un·e partenaire ;
• Demeurer dans la relation, mais se désinvestir émotionnellement.

Si tu te reconnais dans l’un des deux langages du conflit précédents, je crois qu’il pourrait être intéressant pour toi de creuser sur le pourquoi du comment tu réagis ainsi. Style d’attachement insécurisant ? Modèles familiaux plus rough ? Mauvaise journée ? Blessures émotionnelles passées ? Mécanismes de défense dans le tapis ? Tout s’explique, mais tout ne se justifie pas. Je t’invite, avec toute la bienveillance du monde, à te pencher sur la question. Cela pourra te permettre, à long terme, de bien prendre soin de toi et de tes partenaires intimes. You got this. <3

3. La voix (Voice)

Réaction CONSTRUCTIVE et ACTIVE face au conflit.

Tu connais l’expression « la voix de la raison » ? Ça veut dire « envisager la solution la plus raisonnable, la plus sûre ». Eh bien, c’est ce que ce langage du conflit vise. En effet, une personne utilisant ce mécanisme aura tendance à chercher à résoudre le problème par la communication, le dialogue et la négociation. Il s’agit ici de oui, exprimer ses propres sentiments et préoccupations, mais tout en demeurant dans le respect et l’attention de l’autre personne.

La voix est véhicule de compromis, d’ajustements et d’efforts mutuels pour améliorer la relation. Comme :

• Nommer clairement à un·e partenaire qu’on se sent frustré·e quand iel rentre tard sans prévenir et demander à en parler ensemble ;
• Solliciter san partenaire pour trouver un compromis par rapport au temps passé ensemble pour favoriser un équilibre ;
• Négocier la responsabilité de la contraception en écoutant et respectant les besoins mutuels des personnes impliquées ;
• Nommer à un·e partenaire intime une insatisfaction dans la sexualité et trouver des solutions ensemble pour y remédier.

4. La loyauté (Loyalty)

Réaction CONSTRUCTIVE et PASSIVE face au conflit.

As-tu parfois l’impression que, pendant un conflit, tu as besoin d’avoir un moment seul·e pour prendre du recul et te clearer les idées ? Prendre une marche, écouter de la musique, ou encore pratiquer des techniques de respiration, peuvent être des moyens « passifs » à employer pendant un conflit, mais constructifs dans la mesure où ils peuvent te permettre de te se sentir plus disposé·e par la suite.

En ce qui concerne la loyauté, cette dernière est mise de l’avant quand une personne attend patiemment que les choses s’améliorent, sans user de confrontation directe. ATTENTION ! On n’est pas dans l’évitement ici, mais bien dans la TOLÉRANCE et le SOUTIEN visant une amélioration de la situation des partenaires. Il faut jouer la carte de la loyauté avec prudence : celle-ci peut être bénéfique quand le problème est temporaire, mais plutôt risquée en présence d’un conflit sur le long terme. En d’autres mots, ne jamais adresser les choses pourrait amener une certaine insatisfaction. On est toujours mieux servi·e·s en présence d’efforts mutuels !

Dans les relations intimes, lors d’un conflit, le langage de la loyauté pourrait ressembler à…

• Rester patient·e quand san partenaire traverse une période difficile, même si cela signifie une diminution des efforts mis dans la relation de son côté ;
• Continuer à démontrer de l’amour à san partenaire en présence de tensions temporaires ;
• Accepter que san partenaire ait besoin d’un moment seul·e avant d’affronter un conflit et lui laisser son espace.

Pour aller plus loin

Les deux derniers langages du conflit sont ceux qui sont susceptibles de laisser plus d’espace à la communication consciente, ou communication NonViolente, un outil bien utile quand il en vient au partage mutuel des besoins en relation. Pour te familiariser avec celle-ci, je t’invite à consulter cet article.

Après un conflit

L’importance de la réconciliation

La résolution des conflits est essentielle à la satisfaction relationnelle. 

En effet, l’étude de Gordon et Chen (2016) indique que les conflits réduisent la satisfaction relationnelle uniquement chez les personnes qui ne se sentent pas comprises par leur partenaire.

Finalement, ce n’est pas tant la présence de conflits qui importe, mais plutôt la manière dont ils sont vécus par chaque personne impliquée. Le fait de se réconcilier et de se sentir compris·e pourrait être un levier clé pour préserver la satisfaction dans une relation intime.

Question finale : devrions-nous éviter les conflits à tout prix ?

La réponse est : non ! Même s’ils peuvent être porteurs d’émotions désagréables, ils sont importants ! Ils permettent aux personnes y prenant part de s’exprimer, s’individualiser, s’écouter et se comprendre mutuellement.  

Bref, chaque dynamique relationnelle est différente, mais aucune n’est à l’abri des conflits. Bien qu’ils puissent être challengeants, je t’invite à voir les conflits comme des opportunités de croissance personnelle et relationnelle. 

Je radote, mais apprivoiser ses dynamiques est une façon de prendre soin de soi et de ses partenaires intimes actuel·le·s ou futur·e·s !

______________________________

Références

‍

Articles scientifiques

Gordon, A. M. et Chen, S. (2016). Do you get where I’m coming from? : Perceived understanding buffers against the negative impact of conflict on relationship satisfaction. Journal of Personality and Social Psychology, 110(2), 239.

Lamarre, M. et Lussier, Y. (2007). Conflits et ruptures conjugales : les psychologues se prononcent. Psychologie Québec, 24(1), 28-30.

Overall, N. C. et McNulty, J. K. (2017). What type of communication during conflict is beneficial for intimate relationships? Current opinion in psychology, 13, 1-5.

Rusbult, C. E., Zembrodt, I. M. et Gunn, L. K. (1982). Exit, voice, loyalty, and neglect: Responses to dissatisfaction in romantic involvements. Journal of Personality and Social Psychology, 43(6), 1230-1242.