C’est une peur qu’on entend souvent. « C’est trop tôt pour leur parler de ces choses-là », « Il faut préserver leur innocence »… Évidemment qu’on veut protéger les enfants. On imagine l’enfance comme une bulle, un monde magique à préserver, loin de la complexité du réel.
Mais la vérité, c’est que les enfants vivent déjà dans le monde réel. Iels entendent, voient, ressentent, posent des questions. Iels ne grandissent pas dans une bulle. À la maternelle, à l’école, chez des ami·e·s : iels croisent d’autres enfants, interagissent avec des adultes et tombent sur des images ou des mots qu’on n’aurait pas choisis. On n’a que très peu, voire aucun contrôle sur ce à quoi iels sont exposé·e·s. Mais, on a du contrôle sur la façon dont on les accompagne.
Alors, si on veut réellement les protéger, on peut leur donner des repères, plutôt que de les laisser seul·e·s face au flot d’informations. Car l’innocence, ce n’est pas l’ignorance. C’est la possibilité de découvrir le monde avec confiance et à son rythme.
Prenons un moment pour déconstruire quelques idées reçues.
Mythe : les enfants sont trop jeunes pour parler d’intimité
L’idée de parler de sexualité, d’intimité ou de corps aux enfants met souvent les adultes mal à l’aise. Comme si le mot « sexualité » était lui-même sexualisant, et que, si on en parle, on les pousse à s’y intéresser trop tôt.
En réalité, les enfants naissent avec un corps qu’iels veulent comprendre, et une curiosité sur le monde qui les entoure. Ce qu’iels cherchent, ce sont des réponses simples et adaptées à leur âge. Ignorer ces questions ne les protège pas, au contraire, cela les met souvent plus à risques.
En parlant d’intimité, on leur donne un langage, des repères et un filet de sécurité.
Ça permet de :
- Connaître leur corps : nommer les parties intimes, c’est leur donner le droit d’exister, comme n’importe quelle autre partie du corps.
- Les protéger : un·e enfant informé·e reconnaît plus facilement un comportement déplacé ou interdit, et sait qu’iel doit en parler.
- Renforcer la confiance : en ouvrant le dialogue, on leur montre qu’on est là pour les protéger.
Un·e enfant qui connait son corps et qui sait qu’iel a le droit de dire non et de demander de l’aide, c’est un·e enfant plus fort·e et plus libre de vivre sa vie d’enfant !
Mythe : les enfants sont trop jeunes pour parler de genre
Un mythe qui persiste c’est l’idée que le genre, la transidentité et les stéréotypes sont des sujets trop compliqués pour les enfants. Qu’en parler, ce serait leur mettre des idées dans la tête, ou les exposer à des concepts qui ne les concernent pas.
En réalité, les enfants commencent à comprendre et à exprimer leur identité de genre vers 2-3 ans. Que cette identité corresponde ou non à celle assignée à la naissance, elle se construit au milieu d’un monde plein de stéréotypes, de cases et de remarques, tels que « un vrai garçon sait… » ou « une fille doit… ».
Parler de genre avec les enfants, c’est leur offrir un espace où iels peuvent explorer qui iels sont.
Ça permet de :
- Ouvrir les possibilités : les enfants comprennent qu’iels peuvent être elleux-mêmes, sans devoir rentrer dans un moule.
- Éviter les étiquettes : iels se sentent libres d’explorer leur style, leurs jeux et leurs goûts sans jugement.
- Favoriser l’ouverture : iels apprennent à normaliser la diversité et à prendre position contre les moqueries et l’exclusion.
- Prévenir la solitude : si iels se questionnent, iels sauront qu’on peut en parler, et qu’on sera là.
Parler de genre permet d’éviter les éventuels malaises, la honte ou l’isolement face à leur expression de genre, et d’ouvrir un espace de dialogue sans tabou.
Mythe : les enfants sont trop jeunes pour parler de diversité sexuelle
Enfin, on est peut-être d’avis que, oui, la prévention des violences, le consentement et les stéréotypes de genre sont des sujets qui impactent directement les enfants. Mais que la diversité sexuelle, par contre, ce n’est pas un sujet pour les enfants. Parce que les enfants ne vivent pas de relations amoureuses, donc iels ne sont pas encore concerné·e·s.
En réalité, on parle déjà d’amour aux enfants : que ce soit à travers les contes de princes et princesses, les histoires d’amour ou simplement en observant les relations amoureuses des adultes qui les entourent. On oublie simplement que l’hétérosexualité… c’est aussi est une orientation sexuelle et romantique !
Parler de diversité sexuelle, ce n’est pas faire « militer » les enfants. C’est simplement rendre toutes les formes d’amour visibles, pas juste celles qui nous ressemblent.
Ça permet de :
- Visibiliser : expliquer que l’amour, c’est entre des personnes qui s’aiment, peu importe leur genre.
- Normaliser : on ne choisit pas qui on aime, ça nous tombe dessus ! L’amour réciproque et respectueux, ce n’est jamais honteux.
- Protéger : pour que les enfants qui ne se reconnaissent pas dans les histoires d’amour hétéronormées ne grandissent pas avec le sentiment d’être bizarres ou différent·e·s.
Parler de toutes les formes d’amour dès l’enfance, c’est cultiver le respect, l’ouverture, et leur permettre de vivre leurs sentiments sans se cacher.
Réalité : la sexualisation des enfants leur vole leur innocence
Ce qui pousse les enfants dans des rôles d’adultes, ce sont des messages qu’on laisse passer sans même les remettre en question :
- Des compagnies qui vendent des shorts plus courts aux filles qu’aux garçons dès l’âge de 4-5 ans, ou des chandails avec des messages comme « briseuse de cœurs » ou « petit tombeur ».
- Des histoires où les filles doivent attendre qu’un garçon les choisisse pour exister.
- Des adultes qui projettent des « petites histoires d’amour » sur des amitiés entre enfants de genres différents.
- Des codes vestimentaires à l’école qui demandent aux filles de couvrir leurs épaules pour ne pas « déconcentrer les garçons ».
Pourtant, ces messages-là sont rarement remis en question ou pointés du doigt comme de « l’endoctrination des enfants » alors que ce sont ces types de messages qui les sortent de leur monde d’enfant en leur projetant des intentions d’adultes.
Ce qui protège vraiment l’innocence des enfants, ce n’est pas le silence. Le silence laisse place à la gêne, à la honte, à l’idée qu’on a « fait quelque chose de mal ».
Ce qui protège, c’est nommer les choses simplement et sans tabou. C’est être prêt·e à répondre, leur donner des mots, des repères et un cadre pour comprendre le monde qui les entoure. C’est leur dire qu’iels peuvent toujours venir nous parler, nous trouver avec leurs questions et savoir qu’on est là quand iels ont besoin d’aide.
Car un·e enfant qui se sent en sécurité est un·e enfant qui peut vivre pleinement sa vie d’enfant !
Crédit photo : Brett Sayles
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